DEMAIN MONTRÉAL : Plus que reconnaître la spécificité « agriculture urbaine » de Montréal, il faut agir !
Dans le cadre de la consultation sur le Plan développement de Montréal menée par l'Office de consultation publique de Montréal, Eric Duchemin, coordonnateur du Laboratoire a déposé un mémoire dont voici les grandes lignes
L’agriculture urbaine est maintenant reconnue comme élément de planification et de développement urbain des villes du 21e siècle, afin d’en affirmer la résilience ou encore le caractère viable de son urbanisme. Au niveau Québécois, la Politique de souveraineté alimentaire mentionne l’AU[1], tandis que le Plan métropolitain d’aménagement et de développement de la communauté métropolitaine de Montréal mentionne que :
[…] L’agriculture urbaine offre divers potentiels tant au niveau du développement social et éducatif, de la lutte pour la sécurité alimentaire que du verdissement des quartiers. [..] Considérant l’importance grandissante de l’agriculture urbaine et son potentiel à contribuer à l’amélioration de la qualité des milieux de vie, la Communauté invite les MRC et les agglomérations à reconnaître l’agriculture urbaine dans leurs outils de planification. (p.97)
Dans cette mouvance, nous devons reconnaître que le Plan de développement de Montréal (PDM) Demain Montréal mentionne à plusieurs reprises l’une des caractéristiques de l’urbanisme montréalais, soit la place de l’agriculture urbaine dans son paysage, mais aussi dans son histoire. L’agriculture urbaine est devenue au fil des ans un élément du patrimoine montréalais et de son ADN urbaine.Ainsi dans le cadre du PDM on retrouve les mentions suivantes :
- « La proposition [..] propose divers principes d’aménagement et de développement sur lesquels la Ville s’appuiera pour la planification du Montréal de demain », dont la mise en place « d’une ville qui soutient l’agriculture urbaine et l’accès à des aliments sains. » (p.14).
- Afin de consolider et d’améliorer les quartiers existants, le PDM propose d’agir sur « L’amélioration de la sécurité alimentaire par un meilleur accès aux aliments santé (marchés publics, agriculture urbaine, jardins collectifs, etc.) » (p.19)
- Afin de favoriser des aménagements et une architecture de qualité, il mentionne que « La Ville se doit de verdir le domaine public et d’encadrer le verdissement du domaine privé, dans le but d’accroître la biodiversité, de protéger et de créer de nouveaux milieux naturels. Le verdissement des quartiers suppose de poursuivre l’adoption de mesures ou de règlements qui encouragent la plantation d’arbres, l’aménagement de jardins communautaires et privés, l’agriculture urbaine, l’installation de toits verts, la limitation des surfaces imperméables, la mise en réseau des espaces verts, le verdissement des aires de stationnement et des ruelles, etc. » (p. 44)
Trois mentions qui montrent que l’agriculture urbaine est un élément d’action autant sur des questions environnementales (verdissement, biodiversité, îlots de chaleur) que sociales (sécurité alimentaire, aliments sains). Toutefois, cette considération de l’agriculture urbaine dans le PDM fait fi de plusieurs autres fonctions de l’AU (gestion de l’eau, gestion des matières organiques, implication sociale, etc.).En outre, on ne peut que constater la dichotomie entre la vision de développement du PDM et son désir d’action, car l’agriculture urbaine est totalement absente du Plan d’action municipal 2013-2017 proposé. Pourtant, il existe dans ce plan d’action plusieurs endroits ou l’agriculture urbaine et ses acteurs pourraient jouer un rôle et être des partenaires pour le Montréal de demain. Comme le PDM est une vision stratégique de développement de Montréal, il nous apparait primordial d’inclure différents éléments en agriculture urbaine dans le plan d’action 2013-2017, déjà que certaines annonces viennent d’être faites par la Ville de Montréal[2].Propositions de bonifications pour le plan d’action 2013-2017 du PDMQue ce soit dans le cadre de projets de développement d’envergure tels ceux de Bonaventure, Griffintown, Campus Outremont ou encore le futur quartier à venir sur l’Hippodrome de Montréal, l’inclusion de l’agriculture urbaine pourrait démarquer ses projets et faire de Montréal une référence en la matière [1]. La ville devrait rendre obligatoire la présence de l’AU dans ses projets. L’engouement pour l’AU à Montréal n’est plus à faire, le manque de places dans le réseau des jardins communautaires est connu. Ne pas favoriser le développement de jardins dans le cadre de ces projets d’envergure ne va qu’empirer la situation d’une offre insuffisante dans le domaine.Dans le cadre de l’amélioration de l’offre en équipements collectifs municipaux, il serait pertinent de permettre une distribution « équitable » et une diversification des initiatives en agriculture urbaine aux citoyens et citoyennes [2]. Ceci pourrait être en lien avec des interventions prioritaires dans les secteurs défavorisés, qui ont souvent aussi le plus faible accès aux initiatives en agriculture urbaine portées par la Ville [3].Que ce soit dans le cadre de la réhabilitation des parcs, espaces verts et terrains de jeux ou encore l’aménagement de promenades urbaines, l’agriculture urbaine pourrait permettre un verdissement, tout en favorisant l’implication des citoyens dans l’entretien de ses espaces [4]. Les aménagements urbains pourraient inclure des plantes comestibles, les rues pourraient devenir des vergers urbains citoyens. Une appropriation des espaces délaissés pourrait être favorisée, tel le Champ des possibles dans le Quartier Mile End, par la ville afin de laisser une place de liberté aux citoyens et citoyennes dans l’aménagement de la ville. L’agriculture urbaine peut aussi être un élément afin de conserver les familles à Montréal, et pour les jeunes montréalais[3] [5].Voici quelques exemples d’actions que pourrait entreprendre la ville de Montréal dans un plan d’action 2013-2017. Ses actions pourraient aussi déboucher sur la création de projets de développement économique (fermes urbaines, « spin farming », ferme sur toit, projet de transformation, etc.), mais pour ce faire les plans d’urbanisme devront favoriser l’implantation des initiatives soit par une réglementation « toits verts » pour les nouvelles constructions ou encore une réglementation sur une superficie minimale attribuée à l’AU dans les nouveaux développements immobiliers (comme cela est fait pour le verdissement).Dans le cadre des prochaines sections nous tenterons rapidement de démontrer l’importance de l’AU dans l’aménagement et la nécessité d’inclure ce nouvel élément de l’urbanisme dans le plan d’action 2013-2017 de la ville. La ville de Montréal a réellement la possibilité de faire la ville de demain et prenant de nouvelles avenues mais pour cela elle doit intégrer l’un des ses atouts (pas mentionné dans la proposition du PDM; p.14) dans son premier plan d’action 2013-2017. On comptabilise actuellement plus de 30 hectares en culture à Montréal, dont plus de 20 sous forme associative. Soulignons aussi que la Ville a mis sur pied, en 2012, le Comité permanent de la collectivité montréalaise sur l’agriculture urbaine. Cette instance embryonnaire est là pour l’épauler dans cette aventure.Les propos de l’annexe du mémoire viennent appuyer les propositions d’actions énumérées ci-dessus. Plusieurs des réflexions utilisées se retrouvent dans l’ouvrage Agriculture urbaine : aménager et nourrir la ville, 2013, E. Duchemin (éditeur scientifique), Editions VertigO, Montréal 494p.